Les poutres froides

Domaine d'application

Les poutres froides font partie des équipements de refroidissement des locaux.
Il s'agit de tuyauteries parcourues par de l'eau glacée, serties d'ailettes pour favoriser l'échange convectif. Elles sont placées au plafond ou intégrées dans le faux plafond.
On distingue les poutres "actives" ou "dynamiques" (effet d'induction créé par l'air neuf) des poutres "passives" (convection naturelle uniquement)
En quelque sorte, ce sont des convecteurs de chauffage qui ont été placés au plafond pour faire du froid !
Cet échangeur travaille sous un faible écart de température, suite à la condition de non-condensation. Sa puissance frigorifique varie selon la largeur de la poutre, la présence d'induction, l'écart de température,...
Ce produit étant à la mode, la Belgique voit son parc de poutres froides s'agrandir d'année en année, principalement dans les bureaux.
Cette technique s'adapte à la construction nouvelle, mais aussi en rénovation grâce au fait de ne pas devoir percer des parois pour le passage de gainages d'air volumineux.

Fonctionnement

La poutre froide convective se présente sous la forme d'un échangeur de grande longueur. Il est placé nu ou habillé pour être intégré à un faux plafond. Les poutres sont parcourues par de l'eau qui varie entre 15 et 19°C selon les besoins de refroidissement. On ne peut descendre plus bas suite au risque de condensation de la vapeur d'eau contenue dans l'ambiance.
L'échange se fait principalement par convection naturelle.
On distingue cependant deux types de fonctionnement :

Les poutres "actives", ou poutres à induction

L'air neuf hygiénique est injecté par des petites tuyères, créant un appel d'air secondaire venant du local. La convection dans l'échangeur est ainsi renforcée.
Peut-on comparer ce système à un éjecto-convecteur ?
  • Oui, dans la mesure où l'induction par effet Venturi est identique.

  • Non, la comparaison est abusive diront certains, car les vitesses d'air injecté sont nettement plus faibles (pour éviter de créer du bruit !) et l'augmentation de puissance par rapport au système statique n'est pas énorme (de 10 à 30 %). La pression régnant dans le conduit d'air neuf est de 150 à 200 Pa.
Le taux d'air neuf varie entre 1 et 2,5 Volume/heure. Il apporte environ un tiers de la puissance frigorifique totale.
Par le même système, le chauffage des locaux est possible en hiver, même si l'apport de chaleur en partie supérieure du local entraîne une stratification non négligeable des températures !
Exemple d'application.
Bureau paysager...
... équipé de poutres dynamiques.
Le tube central apporte l'air hygiénique, les conduites de cuivre apportent l'eau froide.

 Les poutres passives, à convection naturelle :

Il s'agit d'un échangeur travaillant par simple convection naturelle : l'air chaud du local monte, arrive au dessus de la poutre, traverse l'échangeur, se refroidit et redescend, puisque plus lourd...
Il est important de respecter les espaces nécessaires au bon fonctionnement d'une poutre. Ainsi, si la poutre est intégrée dans un faux plafond, celui-ci devra être ajouré pour laisser passer l'air de convection.
L'apport d'air neuf est dans ce cas indépendant du fonctionnement de la poutre.

Technologies

Les technologies utilisées sont très similaires entre elles. Les poutres se distinguent essentiellement 
  • par leur habillage (poutre carénée ou poutre intégrée dans un faux plafond),
  • par leur intégration dans le local et/ou dans son faux plafond, avec l'objectif de favoriser la convection de l'air,
  • par la distribution de l'air neuf dans la poutre, pour les poutres à induction.
Par exemple, certains modèles n'injectent l'air primaire que d'un seul côté :

Installation

On distingue essentiellement les poutres autonomes qui se placent sous le plafond comme des luminaires,
et les poutres qui sont intégrées, voire cachées dans les faux plafonds.
Différentes formules sont possibles pour que l'air de l'ambiance circule au travers de l'échangeur :
>  une plaque de faux plafond très perforée à côté de la poutre,
>  un faux plafond avec des lames très espacées,
>  une poutre en alternance avec les luminaires,...
Idéalement, la poutre doit être située parallèlement à la fenêtre et du côté du couloir. C'est ainsi que le mouvement de circulation de l'air se fera le plus naturellement (boucle convective qui descend le long du couloir et remonte le long de la fenêtre). Et pourtant, dans 90 % des cas, on rencontre des poutres perpendiculaires à la fenêtre ! C'est sans doute une question d'esthétique vis-à-vis des luminaires...
Attention à celui qui travaille en dessous !
Il est possible, par exemple, de l'intégrer au dos d'une armoire, sur le mur opposé à la fenêtre.

Régulation

Le circuit des poutres est alimenté au régime aller-retour de 15°C - 17°C.

Contrôle de la condensation

Différentes dispositions seront prises pour limiter le risque de condensation 
  • limitation de la température de départ de l'eau pour les réseaux intégrés dans la dalle de plafond,

  • contrôle de l'humidité relative à proximité du plafond et coupure de l'alimentation en eau, pour les réseaux en faux plafonds,

  • contrôle des conditions extérieures pour anticiper les fluctuations d'humidité à l'intérieur du local.
Dans un bâtiment avec fenêtres ouvrantes, l'alimentation du plafond en eau doit pouvoir être interrompue par un contact de feuillure.

Schémas de principe

La régulation de l'alimentation en eau des poutres vise classiquement au maintien de la température de consigne, mais aussi au contrôle de l'absence de condensation sur les tuyauteries.
Sur base de la mesure de la température de l'air ambiant et de son humidité relative, le régulateur détermine le point de rosée de l'ambiance et limite la température de l'eau à un niveau de 1 à 1,5°C supérieur à ce point de rosée.
Cette protection peut également être assurée par un détecteur de condensation placé à la surface du tube d'entrée : si l'humidité relative de l'air à la surface du tube approche de la condensation, un contact est actionné; la vanne est fermée et, éventuellement, la pompe est arrêtée.
Cette pompe peut également être mise à l'arrêt 
  • si la température ambiante est inférieure à sa consigne,
  • si le contact de feuillure placé sur les ouvrants des châssis signale une fenêtre ouverte.

Schéma de raccordement hydraulique

Le raccordement hydraulique et la régulation des poutres froides sont similaires à ceux mis en place pour les radiateurs ou les convecteurs : une régulation par vannes trois voies modulante pour chaque départ de zone homogène.
Par exemple, pour l'implantation ci dessous :
On peut prévoir :

Avantages

  • La séparation entre la fonction ventilation des locaux (air neuf hygiénique) et l'apport thermique (apport de froid) est un gage de bonne régulation.

  • L'air neuf ne sera pas recyclé, évitant ainsi les risques de contamination liés au recyclage de l'air (sick buildig syndrom).

  • Le bruit est limité, pour autant que l'air neuf ne soit pas pulsé à trop haute vitesse (attention aux systèmes actifs).

  • La préparation d'eau glacée à une température de 15°C environ permet la sélection d'une machine frigorifique avec un excellent coefficient d'efficacité frigorifique (ou "COP frigorifique"). Cette propriété n'est tout à fait effective que si une machine frigorifique est spécifiquement prévue pour l'alimentation en eau froide des plafonds. Elle est en partie perdue si la même machine frigorifique est utilisée pour préparer l'air neuf déshumidifié ...

  • Cette température élevée permet d'imaginer, durant une bonne partie de l'année, un refroidissement direct de l'eau glacée dans un aéro-refroidisseur ou dans une tour de refroidissement en toiture, en by-passant ainsi la machine frigorifique. Cette technique est généralement appelée "free-chilling". La consommation liée au froid se résume à l'alimentation des pompes de circulation ! La présence d'une source d'eau froide naturelle peut également être mise à profit (rivière, lac, ...)

  • Le transport du froid vers les locaux par de l'eau glacée (pompe) est environ dix fois moins énergétique que le transport par de l'air froid (ventilateur).
  • La poutre ne fait intervenir qu'un seul corps de métier. Le plafond froid combine lui deux compétences : la pose de faux plafonds et la pose de tuyauteries. L'ensemble est plus complexe à gérer, d'autant que l'oeil est très sensible à la planéité des plafonds.

  • L'encombrement au sol est nul !
  • Certaines poutres froides sont simultanément utilisées comme luminaires.

  • Le système ne demande que le percement de trous pour le passage de tuyauteries d'eau. En rénovation de bâtiments, on évite ainsi l'encombrement des gainages à air de grandes dimensions... De plus, il est possible de récupérer l'ancienne installation de chauffage.

Inconvénients

  • Le coût d'installation est élevé, du moins en rapport à la puissance frigorique fournie.

  • Le confort apporté par les poutres froides est objet à discussion :

    • La poutre statique génère une "coulée" d'air froid très désagréable sur les personnes situées sous les poutres. Elle ne peut a priori se placer que dans les locaux de grande hauteur.

    • Par contre, la poutre dynamique semble plus confortable car elle induit un mélange avec l'air ambiant plus élevé et donc une température de l'air plus homogène.

    • Cependant, à l'intersection entre les flux d'air créés par deux poutres voisines parallèles, les deux flux d'air risquent de tomber sur la tête d'un utilisateur !

    L'utilisation de poutres froides demande donc une plus grande vigilance que les plafonds froids en matière de vitesses d'air résiduelles et d'inconfort lié aux turbulences.
  • La puissance frigorifique reste limitée par rapport aux systèmes traditionnels. Ou du moins, placer des poutres dans les plafonds risque de générer des problèmes d'inconfort si bien que la densité maximale admissible reste faible.
  • Dans le cas des poutres dynamiques, il est courant de pulser un débit d'air supérieur à celui strictement nécessaire pour assurer l'air neuf hygiénique dans les locaux. Autrement dit, pour assurer la puissance de refroidissement demandée par le local, l'air primaire pulsé passe bien souvent de 1 renouvellement horaire à deux renouvellements. Le débit d'air total brassé est alors de l'ordre de 5 (3 renouvellements d'air secondaire sont induits). Or c'est de l'air neuf qui est ainsi doublé, ce qui va générer une consommation supplémentaire très élevée durant la vie du bâtiment.
  • La poutre dynamique est très semblable à l'éjecto-convecteur dans son mode de fonctionnement. On peut donc lui faire les mêmes nombreux reproches. Il est d'ailleurs très curieux que l'éjecto-convecteur, écarté du marché car ne convenant plus aux besoins de souplesse des locaux, revienne aujourd'hui, sous une forme plus complexe encore en matière de maintenance : dans le plafond ! Le prix d'investissement justifie-t-il de refaire les mêmes erreurs ?

  • L'encrassement des poutres demande un entretien régulier, pas toujours aisé lorsqu'on ne souhaite pas interrompre l'activité des personnes.

Coût

Coûts d'investissement ?
Les coûts d'exploitation énergétiques sont plus faibles que dans le cas des systèmes traditionnels (ventilo-convecteurs par exemple). Une étude de cas réalisée par Tractebel Development Engineering précise ce facteur pour les plafonds froids. La situation est similaire pour les poutres froides puisqu'on épargne la consommation des ventilateurs des ventilo-convecteurs, mais on augmente un peu la consommation des pompes de distribution de l'eau puisque qu'un delta T° aller-retour de 2 à 3 K est réalisé contre 5 à 6 K pour les ventilos.

Prédimensionnement

Puissance

Pour les poutres froides statiques, la puissance peut atteindre 70 à 200 W/m linéaires, en fonction de la température ambiante, de la température de l'eau froide et de la largeur de la batterie.
Pour les poutres dynamiques, la puissance est fonction des paramètres suivants :
  • températures d'eau froide (in/out),
  • température ambiante,
  • débit d'air primaire,
  • taux d'induction.
Sur base
  • d'un débit d'air primaire correspondant à 50 m³/h par m de poutre,
  • soit environ 3 renouvellements d'air/heure, si on considère un mètre linéaire de poutre pour 6 m² au sol,
  • d'un écart de température (ambiance - eau froide) de 10°C.
La puissance de refroidissement est de l'ordre de 435 W/m, y compris le refroidissement dû à l'air primaire. Cette puissance permet donc d'assurer un refroidissement correspondant à une charge calorifique dans le local d'environ 75 W/m2.
Mais certains constructeurs atteignent, à débit d'air égal, des puissances de refroidissement jusqu'à 110 W/m2.

Emplacement

Pour les systèmes passifs, le placement des unités et la dimension correcte de la reprise d'air sont très importants. Si on ne prête pas suffisamment attention à ces deux points, la puissance attendue ne sera pas atteinte.
On sera également attentif à l'emplacement de l'apport d'air neuf et à son interaction avec les poutres passives.
Source : Conférence de Mr P.A. Delattre - Tracrebel Development Engineering - journée ATIC du 25.09.98